vendredi 6 août 2010

La lessive de l’ancien temps (la bughée, bugée ou buée)

Dans la vie d’une femme, la « bughée » fut toujours un gros travail, essentiellement féminin.
Même du temps de nos grands-mères, il y avait la petite lessive des menus morceaux de linge qui ne pouvaient attendre la garde-robe étant bien réduite. Le linge de corps, les vêtements de travail et les langes des bébés, tout cela nécessitait une intervention plus rapide chaque semaine.
En effet, les gros draps de toile faits de lin tissé, les chemises, les torchons, les mouchoirs grands comme un jour sans fin, attendaient la grande lessive.
Cette fameuse bughée avait lieu au printemps et aussi en automne suivant les besoins. Le linge sorti des greniers était mis à tremper dans de l’eau fraîche la veille.


Ensuite on procédait à la mise en route en installant la « ponne *» sur une assise de pierre. On allumait le feu en dessous. On disposait un sac de cendre de bois (la cendre contient en effet des phosphates) et le linge. A côté la chaudière économique contenait l’eau bouillante avec laquelle on arrosait le linge sans arrêt. Le surplus de ce « lessis » se récupérait en bas de la ponne par une petite dalle de bois de sureau, la « trute ». Un pot en fer blanc était réservé au « coulage » de l’eau chaude. Elle pénétrait petit à petit le linge. Parfois on ajoutait des racines d’iris pour parfumer l’eau de cette lessive.
Plus tard, on remplacera la cendre par la lessive à « la violette » qui donnait une bonne odeur.
La bughée faite, les morceaux étaient sortis un à un de l’eau encore bien chaude et disposés sur un tréteau pour s’égoutter.
Avant l’installation de la fontaine et de sa pompe, on allait au petit ruisseau quand les puits jetaient. Sinon on tirait de l’eau aux divers puits de la commune avec un seau descendant assez profond au moyen d’une chaine et d’un tour. Bien souvent c’était le travail des hommes de remplir les grandes « bassies » taillées dans la pierre et placées au pied des puits. Certaines présentaient un plan légèrement incliné à l’extrémité pour faciliter le travail et étaient percées pour évacuer l’eau.
Le rinçage nécessitait plusieurs passages en agitant fortement le linge et en se servant du battoir. Ensuite on tordait les draps avant de les arranger sur le véhicule de transport, soit une brouette ou une carriole à cheval.

A l’œil du puits on disposait « un lavoir ». C’était une planche inclinée, dont le bois présentait des cannelures, ajustée sur une sorte de caissette pour s’agenouiller.





La laveuse prenait la précaution de mettre de la paille avant de commencer son travail.


Pour la lingerie, les mouchoirs, on les passait dans une eau teintée avec une boule de bleu pour parfaire la blancheur. C’était déjà un petit bout de progrès.
Quant au rinçage à la fontaine, c’était à peu près semblable. Les hommes à l’aide d’une pompe à bras remplissaient les bassins, c’était déjà moins pénible.
« On peut noter l’attention toute particulière du maire et son conseil concernant la fontaine. Le 13.05.1884, il fut décidé de réparer la fontaine et d’y placer 1 pompe pour mieux servir les habitants. Celle-ci permettrait de remplir plus facilement récipients et lavoirs. Cette pompe actionnée par un grand volant coûta 400 frs ».
Il existait au fond du bâtiment, aujourd’hui en mauvais état, une cheminée largement béante et noircie permettait de chauffer l’eau et peut être suivant la saison de se dégourdir les doigts.
En 1942, date de l’arrivée de l’eau sous pression on utilisa ce service à la maison et les lessiveuses rendirent le travail plus agréable.

Photo du château d’eau prise durant l’hiver 1943

Le séchage, bien loin de nos actuels sèche-linge se faisait étendu sur l’herbe de l’« ouche », les petits morceaux sur une palisse.
Certains pensaient à cette époque que la lune apportait de la blancheur.
Il fallait selon les coutumes respecter certains jours où la lessive n’était pas permise, tel le Vendredi Saint.
Au siècle dernier et bien avant, le linge sale ne se lavait pas en famille car très souvent c’était un groupe de plusieurs personnes qui assumait cette tâche ardue mais remplie par les histoires du village et les qu’en-dira-t-on.


Les bras tapaient, brossaient et les langues tournaient, mais vive la machine à laver !!!
Le 1er lave-linge apparut en 1923 mais pas à Courcôme !!! et la Mère Denis ne vanta la marque Vedette que bien des années plus tard.

* La ponne : cuve en terre cuite de 100 à 300 litres. Ces grands cuviers qui à présent décorent nos jardins étaient fabriqués pour le Nord-Charente à Benest et pour le Sud-Charente à St-Eutrope.


Désignation Contenance en litres
- Ponne 300
- Mâle 200
- Ponnon de ponne 150
- Ponnon de mâle 100
- Ponuchon (ponichon) 70
- Ponuche (poniche) 50